L’Afrique est devenue en quelques années l’épicentre mondial du terrorisme et la communauté internationale doit « combattre cet enfer maintenant, avant qu’il ne devienne incontrôlable », a déclaré mercredi le Secrétaire général de l’ONU, António Guterres.
« Partout sur le continent, Daech, Al-Qaïda et leurs affiliés exploitent la dynamique des conflits locaux et les fragilités pour faire avancer leur agenda, tout en déchiquetant le tissu social de pays entiers avec de la violence, de la méfiance et de la peur », a dit le chef de l’ONU lors d’une réunion du Comité de coordination du Pacte mondial de lutte contre le terrorisme des Nations Unies ayant pour thème la coordination des initiatives antiterroristes en Afrique.
M. Guterres a noté qu’en Somalie, Al-Shabaab est « sous pression, mais loin d’être vaincu » ; que dans l’est de la République démocratique du Congo, « les terroristes continuent de s’en prendre aux civils, tout en élargissant leurs zones d’opérations » ; que le terrorisme reste une menace active dans le nord du Mozambique ; que dans tout le Sahel, les hostilités accrues entre groupes terroristes luttant pour le contrôle du territoire et les trafics « créent rien de moins qu’un enfer sur terre pour les innocents pris au piège » ; et que la menace s’étend rapidement aux pays côtiers, comme le Bénin et le Togo.
Selon le Secrétaire général, une tendance est claire : « communauté après communauté, les groupes terroristes étendent leur influence, développant leurs réseaux continentaux avec plus de combattants, de financement et d’armes, forgeant des liens avec des groupes criminels organisés transnationaux, et répandant la peur, la misère et des idéologies haineuses à travers le cyberespace ».
« Dans tous les cas, ce sont les civils qui paient le prix le plus élevé », a-t-il ajouté, appelant à « combattre cet enfer maintenant, avant qu’il ne devienne incontrôlable ».
Il a noté un certain nombre d’exemples positifs d’États membres et d’organisations sous-régionales qui intensifient leur lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violent. Il a cité le Groupe de travail multinational du bassin du lac Tchad pour lutter contre Boko Haram, la Mission de transition de l’Union africaine en Somalie, et les efforts de la Communauté de développement de l’Afrique australe et du Rwanda pour lutter contre le terrorisme dans le nord du Mozambique.
« Nous travaillons nous-mêmes en étroite collaboration avec l’Union africaine, la CEDEAO (Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest) et d’autres en matière de prévention, d’assistance juridique, d’enquêtes, de poursuites, de réintégration et de réadaptation, ainsi que de protection des droits de l’homme – y compris notre soutien aux pays dans la mise en œuvre de la Stratégie antiterroriste mondiale des Nations Unies », a souligné M. Guterres. « Nous aidons également à soutenir les victimes et les survivants du terrorisme afin qu’eux et leurs familles guérissent de tout ce qu’ils ont enduré ».
Un autre signe de progrès important a été, selon lui, l’adoption unanime par le Conseil de sécurité des Nations Unies de la résolution 2719 sur le financement des opérations de soutien à la paix dirigées par l’Union africaine.
Mais, malgré tous ces efforts, le Secrétaire général a jugé nécessaire « une action urgente, d’une ampleur bien plus grande que celle que nous avons vue jusqu’à présent ».
Notant que le terrorisme trouve son foyer dans la fragilité et l’instabilité, il a estimé que les efforts doivent être ancrés dans un développement durable et inclusif. « Le Nouvel Agenda pour la paix met un nouvel accent sur la prévention. Il fait le lien entre l’investissement dans le développement, la construction de structures de gouvernance solides et de systèmes judiciaires auxquels les gens peuvent avoir confiance, et la création d’une paix durable », a-t-il souligné.
Ces efforts doivent aussi être ancrés dans les droits de l’homme, alors que le terrorisme représente un déni de ces droits et que « nous ne pouvons pas le combattre en répétant le même déni » , a dit le chef de l’ONU.
« Trop souvent, les mesures antiterroristes sont utilisées à mauvais escient ou ont des résultats inattendus lorsqu’elles sont mises en pratique, et conduisent à des violations des droits humains. C’est une recette pour le ressentiment, les griefs profonds et davantage de morts et de destructions », a observé le Secrétaire général, pour qui la réponse collective au terrorisme doit être fondée sur le respect des droits de l’homme, l’État de droit et la recherche de la paix.
Il a noté que les femmes et les filles sont souvent les premières – et les plus gravement – touchées par le terrorisme, de nombreux groupes terroristes ayant une stratégie commune : l’assujettissement patriarcal des femmes et des filles et « des actes de violence scandaleux à leur encontre ».
« Nous devons concentrer nos priorités et stratégies antiterroristes sur cette question importante, qui est au cœur de notre engagement en faveur des droits humains de tous, y compris la sécurité et la liberté des femmes et des filles », a-t-il dit.
Au cours de cette réunion du Comité de coordination du Pacte mondial de lutte contre le terrorisme des Nations Unies qui dure deux jours, les États membres, les organisations régionales, les entités du Pacte contre le terrorisme et la société civile travaillant en Afrique doivent échanger leurs points de vue sur l’expansion continue des groupes terroristes et armés dans certaines régions d’Afrique.
Le Secrétaire général adjoint à la lutte contre le terrorisme et président du Comité de coordination du Pacte contre le terrorisme, Vladimir Voronkov, a souligné mercredi qu’endiguer la menace terroriste croissante à travers le continent « exige une réponse plus robuste qui s’appuie sur les meilleures connaissances, c’est-à-dire bien coordonnée et adéquatement financée ».
Il a en outre souligné que « ce Pacte nous fournit un cadre de collaboration efficace pour soutenir les efforts antiterroristes des États membres et témoigne de notre engagement commun en faveur d’un monde sans terrorisme ».
Auteur : Gabon Matin