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Andy Nziengui : La politique d’égalité des chances ou quand mon parcours confirme le mythe

Andy Nziengui : La politique d’égalité des chances ou quand mon parcours confirme le mythe © 2020 D.R./GabonSoir

"Égalité des chances : mythe ou réalité ? " La question est pertinente au regard du doute qui a envahi la jeunesse, laquelle se retrouve divisée face à ces nominations récurrentes « d’enfants de » à des postes que l’on dirait « héréditaires ». Cette jeunesse est traumatisée par un taux de chômage galopant, encore plus accru depuis l’émergence de la pandémie à Corona virus.

Pour y répondre, il est nécessaire de questionner notre intelligence et, surtout, de la soumettre à l’épreuve des faits. Ces faits qui vont étayer mon présent et troisième droit de réponse, grâce notamment à des exemples concrets tirés de mon parcours en tant que jeune leader.

Dans sa lancée, le Président de la République a, en 2016, engagé le peuple gabonais dans un nouveau challenge qu’il a baptisé : « Egalité des chances dans le cadre du septennat de la jeunesse ». Durant la campagne présidentielle, cette majestueuse invite sonnait alors comme un simple slogan vide de sens pour certains. Comment penser autrement au regard des promesses non tenues et de la propension des médias, notamment des réseaux sociaux, à inonder nos esprits de tonnes d’informations diffuses chaque jour.
L’essence et la quintessence même de l’égalité des chances tombent sous le coup de la vulgarité conceptuelle, laquelle, depuis toujours, distrait la jeunesse gabonaise, faisant d’elle, comme on le lit sur lesdits réseaux sociaux, la génération « atalakouïste et kounabéliste », ou « Génération Casse-croute » pour reprendre ici le titre du premier ouvrage de Sharon Onkoni, Ambassadeur de l’UA pour la Lutte contre la Corruption.

Pourtant, « Il ne peut y avoir plus vive révélation de l’âme d’une société que la manière dont elle traite ses enfants ». Cette citation de Nelson Mandela est une invitation à toujours accorder une attention particulière à la jeunesse, à toutes les jeunesses. Cette attention – ou ce soutien –, mon pays, le Gabon, ne me l’a jamais apporté.

✔️Premier fait

En effet, en juin 2004, juste après l’obtention de mon bac, je fus sélectionné parmi les 300 jeunes leaders du monde ayant un parcours académique, associatif et entrepreneurial exceptionnel pour passer le concours du Parlement international de la jeunesse (PIJ), initié par Oxfam Aid Abroad, le Parlement australien et l’Université de Sidney sous l’égide du Secrétaire Général des Nations Unies de l’époque, M. Koffi Annan.

Suivi par mes deux encadreurs (enseignants de Français) M. Kodjo Bassowou et M. Moua Kalgora, sous le mentorship de mon grand-frère, Jean Pierre Dougaga, l’actuel député de la Nyanga, j’ai remporté l’ensemble des étapes aux niveaux régional et continental : Prix de l’excellence africaine (CEA), Prix Francophone (Unité Jeunesse), Prix de leadership sur l’Education (Fondation Paul Gérin-Lajoie, Canada) et finalement 1er au Prix de l’excellence et du leadership jeunesse 2004-2007 (le mandat du PIJ dure 4 ans).

La remise du trophée et de la médaille d’honneur devait se tenir à Sydney en Australie autour d’une grande cérémonie organisée par la reine d’Angleterre, le Premier Ministre australien et le SG des Nations Unies. Pour m’empêcher d’aller récupérer le prix, le Gabon s’était subitement et miraculeusement retiré des pays membres du Parlement international de la jeunesse, faisant de moi un candidat inéligible et observateur lors de la cérémonie d’ouverture officielle. D’autres noms ont été envoyés pour représenter le Gabon à ma place.

Embarrassé, le gouvernement australien avait écrit au Gabon pour décanter la situation. Le Ministre des Affaires Etrangères (M. Jean Ping) avait confié ce dossier à la Direction de la Francophonie, dirigée à l’époque par M. Benoit Mouity Nzamba. Celui-ci avait pris la peine d’interpeller le Ministère de la Jeunesse et des Sports, le Ministère du Budget, le Sénat et l’Assemblée Nationale.

J’apprendrai étonnamment que la décision finale devait échoir aux autorités de ma province d’origine, à travers une étude de moralité et d’identification du parrain qui se cache derrière ma personne. Chose assez étrange : en quoi ma province était-elle concernée dans un projet de cette envergure capable de valoriser potentiellement le Gabon en matière de leadership ?!

C’est dans ce cadre que j’avais été reçu par M. Clotaire Ivala, Ministre de l’Intérieur, désigné pour consulter les doyens politiques de la Nyanga. La réponse des hauts cadres de la Nyanga fut négative. Pour m’encourager à soutenir cette décision, le Ministre m’avait remis une somme de 100 000 FCFA « pour le taxi » par le biais de M. Jean Eric Nziengui Mangala, actuellement Conseiller en Communication au Ministère de l’Intérieur.
Informée de la situation, Mme Maité Mapangou, Directrice de la Fondation Horizon Nouveau, avait fait de ce dossier son affaire. Elle a alerté la Première dame du Gabon (Mme Edith Lucie Bongo) qui avait remis les pendules à l’heure : réintégration du Gabon au Parlement international de la jeunesse, prise en charge totale de mon séjour par elle-même, établissement en urgence de mon passeport. Tout cela, en une seule journée !

✔️ Deuxième fait

En août 2010, j’ai été retenu par le Département d’Etat américain sur la base d’un processus très sélectif et rigoureux pour participer au Grand dialogue du Président Barack Obama avec les leaders africains.

Une fois les formalités de visa et d’interview à l’ambassade des USA au Gabon remplies, quelle ne fut pas ma surprise lorsque j’ai été convoqué par des agents des services secrets qui avaient alors confisqué mon passeport. J’avais interdiction de quitter le territoire gabonais ; je ne pouvais montrer le discours que j’avais préparé pour la circonstance à qui que ce soit, ni accepter l’allocution proposée par les plus hautes autorités.

C’est Mme Laure Olga Gondjout qui me sortit de ce guêpier. Pour ce faire, elle m’avait reçu en audience médiatisée et exigé qu’on me laisse tranquille.

✔️Troisième fait

Nous sommes en 2012, lors du Congrès Panafricain de l’Union Panafricaine de la jeunesse (UPJ). Le Gabon s’était à nouveau illustré par un refus catégorique d’envoyer le bordereau du trésor pour le paiement des frais de cotisation annuelle dans le but de m’empêcher d’être membre du Comité Exécutif.

Malgré l’intervention de M. Jean Ping, alors Président de la Commission de l’UA, rien n’a été fait. C’est l’Afrique du Sud et la Guinée Equatoriale qui avaient déboursé les fonds nécessaires pour que je puisse me présenter.

✔️Quatrième fait

En 2014, j’étais candidat à la présidence de l’UPJ. Le Président de la République avait donné son accord, Mme Clémence Mezui avait fait le tour de l’Afrique pour solliciter le soutien des pays amis, sur instruction du Président de la République. Les choses semblaient rentrer dans l’ordre sous le mandat de M. Blaise Louembé, Ministre de la Jeunesse.

Malheureusement, certains « vendeurs d’illusion » avaient gardé une carte sous la manche pour me faire échouer. C’est le "jour-j" que le Protocole d’Etat m’avait remis un billet d’avion dont l’itinéraire faisait en sorte que je ne puisse participer qu’à la cérémonie de clôture du Congrès Panafricain.

C’est ainsi que le Gabon a perdu le leadership au niveau mondial. Les mêmes qui ont saboté mon dossier, m’ont conseillé de quitter le Gabon – « Tu es compètent, tu as des relations, va travailler ailleurs », me disait-on – où d’intégrer la maçonnerie. Certains ont suggéré l’UJPDG ou le cercle des homosexuels. D’autres ont proposé une conversion à l’Islam qui jouirait d’un puissant lobbying.

Ayant refusé, mon dossier d’intégration, plutôt bien avancé dans le processus administratif a tout simplement été supprimé, tant des registres de la Fonction Publique qu’au sein du Ministère des Affaires Etrangères où il avait été introduit. D’ailleurs, M. Issoze Ngondet, alors Ministre des Affaires Etrangères, déplorant cette situation plus que gênante, avait adressé une correspondance officielle au Président de la République, sollicitant de ce dernier qu’il prît une décision finale dans cette affaire.

Ladite décision visait, d’une part, à clarifier mon statut en tant que l’un des acteurs clé du secteur jeunesse au Gabon et, d’autre part, à le protéger, lui, d’éventuelles représailles de mes oppresseurs.

Fort heureusement, le Président de la République m’a reçu, dans sa résidence à Malabo, lors d’un Sommet des Chefs d’Etat. Il donna instruction à son Aide de camp (M. Arsène AMVAHOU) et à M. Junior NDONG, alors Chargé de mission, pour que mon dossier soit traité en urgence, c’est-à-dire au cours du Conseil des ministres suivant, et que je sois logé de façon décente et qu’une voiture personnelle me soit attribuée.

Aujourd’hui, je suis considéré comme un paria, dont ces mêmes « vendeurs d’illusion » justifient le statut par des « il ne respectait pas les hautes instructions… ». Or, si instructions il fallait respecter, qu’en est-il advenu de celles édictées par le Chef de l’Etat en ma faveur, compte tenu du caractère sacré concédé aux paroles d’un Chef d’Etat ?

✔️Au regard de ce que j’ai subi

Je me demande si « l’avenir en confiance » se fera avec les jeunes. La jeunesse gabonaise est-elle sacrée ou sacrifiée ?

Que faire pour rétablir la justice sociale lorsque la réussite académique et l’avenir professionnel dépendent non pas de l’intelligence, du courage, de l’ardeur au travail ou de la méritocratie, mais plutôt de la province d’origine, du quartier de résidence, du soutien d’un « bon grand » ou d’un « aîné », du port d’un t-shirt à l’effigie d’un homme politique, de l’appartenance religieuse voire ésotérique, ou du nom que l’on porte ?

Comment faire comprendre "l’égalité des chances" à un jeune qui se sent prisonnier de son milieu, de son quartier, de ses origines ? Comment faire aborder la notion de l’égalité à ceux qui ont la conviction que, quoi qu’ils fassent, quel que soit le mal qu’ils se donnent, les efforts, les sacrifices qu’ils consentent, ils ne peuvent pas réussir ?

Que faire pour sortir du MAL-IN-GA (comprenez MAL IN GABON), tel que dépeint par le jeune écrivain gabonais, Beniscien Bouschedi, afin de délivrer le pays des ténèbres du sous-développement et des démons qui nous obligent aujourd’hui à envisager un changement de paradigme ?

C’est pour ces raisons que je prends la peine de parler et de dénoncer, de dire la vérité, pour que les générations suivantes ne subissent pas le même sort que moi. Ceux qui sont au fait de la situation ne parlent pas.

Je parle pour dire que ceux qui entravent l’égalité des chances doivent être combattus. Tout ce qui empêche chacun de faire valoir ses talents et ses mérites doit être corrigé. L’égalité des chances doit cesser d’être théorique pour devenir réelle. Mais avant toute chose, un changement des mentalités est on ne peut plus nécessaire afin de désarmer et mettre hors d’état de nuire les résistants, ces vendeurs d’illusion, qui empêchent le pays de véritablement décoller.

Le président John Fitzgerald Kennedy disait : « Ne demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous. Demandez ce que vous pouvez faire pour votre pays. » A cela, moi, je réponds : « J’ai passé 25 années de ma vie au service de la jeunesse, regardez ce que mon pays a fait de moi ».


Andy Roland NZIENGUI NZIENGUI, Prix de l’excellence Africaine.

Auteur : Rédaction GabonSoir


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